Baromètre climat 2023 : l'assurance attendue au tournant !

Baromètre climat 2023 : l'assurance attendue au tournant !

Alexandre Pengloan
Rédigé par Alexandre Pengloan
14 décembre 2023 - 5 minutes

Un risk manager passait de 5 à 10% de son temps sur les risques naturels. Maintenant, c’est 40 à 50% !

On ne vous apprendra rien en disant que les impacts du changement climatique sont exponentiels. Il demeure en revanche important d’être en mesure de suivre le rythme, afin de lister les défis et de bien identifier les zones d’ombre. Pour cela, une publication s’impose comme essentielle pour prendre de la hauteur : le baromètre de l’engagement pour le climat.

L’AMRAE, en collaboration avec AXA Climate, a dévoilé la 3e édition de ce rapport en ce mois de décembre. Le document, dense, vient nous rappeler à quel point le contexte évolue rapidement. Il se veut aussi un outil pour aider l’écosystème du risque à y voir plus clair, et, in fine, à affiner ses stratégies.

L’assurance est bien évidemment concernée et une large part du rapport lui est consacrée. Alors, où en est le secteur en 2023 ? Les professionnels du risque sont-ils satisfaits des solutions proposées ? Le paramétrique et autres solutions alternatives ont-elles décollé ? Et quelles pistes privilégier pour, demain, faire mieux ?

Une nouvelle maturité des risk managers

L’augmentation des catastrophes naturelles, en fréquence comme en intensité, n’échappe à personne. En première ligne, les risk managers voient leur quotidien profondément impacté. Le sujet est donc loin d’être neuf pour eux. Mais ils amènent aujourd’hui la réflexion à un nouveau stade.

On observe une meilleure prise en charge de la RSE dans le quotidien des risk managers. Après l’observation, nous entrons dans une 2e phase : celle de la capacité à exécuter.

Antoine Denoix, CEO AXA Climate

Bonne nouvelle… si ce n’est que tout ou presque reste à faire ! En effet, un changement de paradigme s’impose, caractérisé par la nécessité de se projeter. Exit la temporalité classique, les professionnels du risque doivent envisager leur activité à l’aune d’un horizon 2030, voire 2050.

Rien d’évident, forcément. Le baromètre met d’ailleurs en lumière, à travers de nombreux insights, les défis à relever. L’écosystème a surtout besoin des bons outils pour avancer. On parle ici de la donnée, clé pour mieux comprendre l’exposition au risque. Mais aussi de l’assurance qui, tant du côté prévention que protection des activités, détient un rôle clé dans cette équation.

assurance changement climatique

L’assurance sous tension

51% des risk managers expriment leur insatisfaction par rapport à l’accompagnement des assureurs sur les risques climatiques.

Voici un chiffre particulièrement impactant du baromètre. Il y a certes, un léger progrès (6 points de plus sur la satisfaction qui atteint 18%) mais on est toujours loin du compte. Cette statistique colle en effet mal à l’état d’urgence émanant du rapport.

Le manque de transparence de la tarification des risques cat nat explique en grande partie ce constat. Dans un marché toujours tendu, les risks managers craignent l’inassurabilité, à la fois des zones géographiques, mais aussi de certaines activités. Plus de 50% d’entre eux déplorent d’ailleurs encore cette année la réduction des expositions, caractérisée par une hausse des franchises et une baisse des limites.

Les professionnels sondés regrettent aussi l’absence d’une tarification incitative pour les entreprises qui prennent des initiatives dans la gestion des risques physiques liés au changement climatique.

Par exemple, l’innovation autour des matériaux bas carbone, ou des nouvelles mobilités (hydrogène, électrique), implique un transfert de risque. Elle pose un problème aux assureurs qui ne disposent pas suffisamment de recul pour bien adresser ce « risque de transition ». Et le point de blocage survient avec la massification de la technologie, comme pour l’éolien ou, demain, le véhicule électrique.

Les mondes de l’assurance et de la réassurance doivent, eux aussi, composer avec un contexte mouvant qui ne facilite pas leurs tâches. Avec le climat, ils se retrouvent contraints de se réinventer. Mission fastidieuse, mais les pistes à creuser existent.

Un rôle grandissant à venir des « risk techs » ?

On l’a dit, le baromètre se veut un outil destiné à aiguiller l’écosystème dans la bonne direction. L’une des missions de l’AMRAE consiste à favoriser la création de lien entre les différentes parties prenantes. Il a donc été directement demandé aux risk managers quels axes d’amélioration ils attendent de la part des assureurs.

Le volet prévention, avec un focus sur le risque sur site, arrive en tête. Identifier, évaluer, gérer proactivement. Cette nécessité de muscler la prévention émerge aussi dans le camp de l’assurance. C’est donc un bon point, mais il faut aller dorénavant plus loin.

Comment ? En accentuant le dialogue technique, en premier lieu. La coopération doit franchir un cap, avec des assureurs qui intègrent la réflexion au cœur de l’entreprise, et donnent leur avis sur les mesures préventives à déployer, notamment.

Sur le sujet assurance pure, le problème des capacités inquiète de tous les côtés. Mais là aussi, de nouvelles solutions apparaissent. On pense notamment au paramétrique, dont la cote flambe.

36% des risk managers envisagent d’avoir recours à l’assurance paramétrique, soit une augmentation de 10 points en un an.

Diluer le portage de risque pour être capable de mieux le soutenir, une idée pertinente, qui fait son chemin. Cette stratégie implique un accès élargi à la data, et un usage toujours plus fin de cette dernière.

Dans cette optique, le recours aux startups innovantes sur ces sujets prend tout son sens. Les climate techs, insurtechs, ou plus largement les « risk techs » ainsi que les qualifie judicieusement François Lanavère d’AXA Climate, ont ici une opportunité à saisir.

Et ça tombe bien, puisque nous avons en France de nombreuses pépites qui adressent différentes briques autour du sujet. Citons pêle-mêle, et de manière non exhaustive, Descartes Underwriting, HD Rain, Kayrros, NamR, Weather Claims Control ou Risk Weather Tech.

L’AMRAE mettra en avant, pour la deuxième année consécutive, des startups de l’écosystème Insurtech France lors de ses traditionnelles rencontres de février prochain. Une initiative venant valider l’idée que, face à un défi de l’ampleur du changement climatique, le monde du risque devra trouver les réponses dans le collectif.

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