« Il ne suffit plus de regarder les 20 années précédentes pour anticiper les 20 prochaines années ! » | Itw de Ruben Hallali, CEO de HD Rain 

« Il ne suffit plus de regarder les 20 années précédentes pour anticiper les 20 prochaines années ! » | Itw de Ruben Hallali, CEO de HD Rain 

Emilie Autin
Rédigé par Emilie Autin
22 avril 2022 - 5 minutes

15 au Brésil, 200 en Côte d’Ivoire, 1000 sur l’arc méditerranéen, 50 en Géorgie. Nous ne parlons pas là d’une espèce en voie d’extinction, mais au contraire d’une technologie en pleine expansion ! Les petits capteurs de HD Rain, startup créée en 2018 à Toulouse, sont en train d’être déployés partout dans le monde. Capteur par capteur, les territoires sont maillés puis analysés pour savoir où il pleut et là où il va pleuvoir.

Et ce n’est pas une mince affaire, juste utile pour savoir si vous pourrez aller en terrasse ce soir ! Les assureurs comme les réassureurs ont besoin de ces données pour élaborer des produits plus efficaces, et ainsi mieux indemniser et protéger leurs clients. Ruben Hallali, le CEO de HD Rain, a accepté de nous dévoiler les secrets de ses incroyables technologies.

Mesurer la pluie, plus compliqué qu’il n’y paraît !

Bonjour Ruben ! Comment est née l’idée de HD Rain ?

J’ai fondé HD Rain en 2018 avec mes deux autres cofondateurs, François Mercier et Duminda Ratnayake. Nous sommes partis du constat que nous vivons dans un monde où le changement climatique se fait de plus en plus sentir. On l’a bien vu récemment avec le dernier rapport du GIEC ! Les phénomènes météos extrêmes vont donc s’amplifier. Ils seront plus violents, plus localisés et reviendront plus souvent.

On ne manque pas de données scientifiques sur ce genre de choses, mais ce sont des enjeux mal anticipés. Dans les pays de l’OCDE, on a des territoires plutôt bien couverts. Cependant, dans 80% des pays, il n’y a aucun moyen de mesure et de prévision météo fiable. C’est pour ça que chez HD Rain, on a décidé de commencer, comme son nom l’indique, avec un produit lié à la pluie.

Et comment vous y prenez-vous pour mesurer la pluie ?

Pouvez-vous nous faire une démonstration du fonctionnement de votre plateforme ?

Des collaborations avec des assureurs français

Qui est intéressé par ce genre de données ?

Depuis nos capteurs, on récolte des données qu’on exploite. On vend après ces datas sous forme d’abonnements. Les personnes qui sont le plus intéressés à l’heure actuelle sont les assureurs, les réassureurs, les collectivités locales, les agences météo et les entreprises qui gèrent les ressources en eau. Certaines entreprises de négoces de matières premières ont aussi besoin de données précises que l’on peut leur fournir.

Justement, les assureurs, y a-t-il des Français intéressés ?

En 2019, nous étions passés par l’accélérateur d’Allianz, qui a été un fast track pour parler avec eux. Depuis, nous sommes entrées en contact avec leur équipe climat avec qui nous travaillons. HD Rain travaille depuis principalement avec Allianz et Descartes Underwriting sur de l’assurance paramétrique. Du côté des réassureurs, nous voulons leur vendre des données ultra précises. Ils pourront les intégrer dans leur modèle de risque. À l’heure actuelle, il ne suffit plus de regarder les 20 années précédentes pour anticiper les 20 prochaines années !

L’assurance paramétrique répond aux défis de demain

Concrètement, quelle est la plus-value de HD Rain pour les assureurs ?

Le modèle paramétrique, c’est le futur de l’assurance ?

Compte tenu de ce qui est en train d’arriver, certaines choses devront être abandonnées par les assurances. Ils ne pourront pas maintenir le même modèle économique sur certains risques qui vont sortir de l’absorbable en coût pour les entreprises et la société. Quand on pense au régime CatNat ou au régime agricole, on fait jouer la solidarité nationale. Malheureusement, dans les prochaines années, tout ne pourra pas rester dans ce genre de régimes.

Pour moi, certains produits ne pourront plus être distribués ! Il est donc nécessaire d’imaginer de nouveaux modèles. L’assurance paramétrique répond à mon avis à beaucoup de ces enjeux et de ces problèmes. Elle correspond bien à ces nouveaux usages du marché.

« Le GIEC a besoin de grands communicants pour l’aider »

Le changement climatique, vous en voyez déjà des effets concrets ?

Sur quelques années d’existence, c’est compliqué pour nous de voir des effets concrets. Par contre, on observe et on mesure, déjà, des phénomènes directement liés au changement climatique en France. Quand au mois de mars, nos stations de l’Aude, du Gard ou de l’Hérault mesurent plus de 300 millimètres de pluie, soit l’équivalent d’un épisode Sévenol, ce n’est pas normal !

Le GIEC a publié un rapport récemment, et pourtant peu de gens ont abordé le sujet. Pourquoi selon toi ?

C’est vraiment terrible que ce sujet ne soit pas plus abordé. Moi, je reproche une chose au GIEC : ils sont mauvais en communication. Il mérite de trouver de meilleurs communicants ! Il y a certains visuels dans le rapport, où je mets une heure avant de comprendre ce qu’ils ont mis dessus, alors que j’ai un doctorat en sciences atmosphériques ! C’est une excellente qualité scientifique, et je suis très heureux que ce groupement d’experts rigoureux existe. C’est leur seul défaut, il leur faut de grands communicants qui pourront les aider.

L’équipe de HD Rain pourra bientôt compter sur une panoplie de nouveautés. Elle espère déployer encore cette année ses capteurs en Europe, mais aussi partout autour du globe. Pour la fin d’année 2022, une levée de fonds est envisagée. L’objectif est simple : doubler les effectifs, et la présence de l’entreprise partout dans le monde !