L'assurance en effervescence, le baromètre ! - Edition mars 2024

L'assurance en effervescence, le baromètre ! - Edition mars 2024

Alexandre Pengloan
Rédigé par Alexandre Pengloan
15 mars 2024 - 7 minutes

Ça bouge dans le microcosme de l’assurance ! L’innovation aux multiples visages se trouve plus que jamais au cœur des enjeux en 2024. Afin d’analyser les tendances de fond, nous faisons appel à l’œil de Florian Graillot et aux experts d’Astorya pour concocter un contenu spécialement pensé pour les pros du secteur : « L’assurance en effervescence, le baromètre ! »

👀 L’œil du VC Florian Graillot

Le début d’année est marqué par une forte activité autour de la brique souscription. Une effervescence révélatrice des enjeux du moment pour les assureurs, qui doivent aujourd’hui gagner en efficacité sur plusieurs aspects de leur activité.

Florian Graillot

souscription insurtech

La souscription a, depuis les origines, constitué le cœur du métier d’assureur. Historiquement, l’underwriter était ainsi une personne qui apposait sa signature au bas d’une police d’assurance, s’engageant à assumer une part du risque.

Bien connaître le risque n’a cependant rien d’évident. La tâche requiert de l’expérience, de l’expertise et la capacité à faire parler la donnée. Des compétences extrêmement pointues, donc, qui peuvent aujourd’hui bénéficier de l’appui de la technologie.

Des insurtechs ont d’ailleurs bien identifié l’opportunité et se spécialisent sur cette niche. On pense évidemment en premier à Akur8, pépite française de la tarification boostée à l’IA. Dans la continuité de sa levée de fonds de sa levée de 23 millions d’euros l’an passé, la Parisienne enchaîne les partenariats – dont de nombreux avec des acteurs historiques – et affermit une ambition internationale.

Elle n’est toutefois pas seule. Début 2024, Hyperexponential, qui travaille aussi sur le pricing nouvelle génération, a aimanté 73 millions de dollars. En parallèle, Artificial Labs, autre insurtech britannique, a également levé 9,4 millions d’euros. La Polonaise Quantee, spécialiste de la tarification dynamique, développe pendant ce temps son activité outre-Manche.

Et c’est sans mentionner les startups élaborant des solutions destinées à appuyer la souscription comme Envelop Risk, Continuity, Wenalyze ou Percayso (liste non exhaustive !).

Ces insurtechs ont donc particulièrement la cote en ce moment, car elles viennent accompagner les assureurs sur trois points cruciaux :

  • l’amélioration de l’existant. Sur les risques standards, il existe un vrai enjeu d’expérience utilisateur à l’heure du digital. Proposer des parcours mieux pensés, plus fluides, avec moins de questions, des offres davantage personnalisées… Une UX aux petits oignons n’est désormais plus une option !
  • la hausse des prix. Dans un contexte économique et climatique compliqué, les assureurs se retrouvent sous tension. Devant conserver une marge pour garantir la pérennité de leur activité, ils n’ont d’autre choix que de relever leurs prix. Mais les clients ne pourront suivre indéfiniment. D’où la nécessité de trouver plus de finesse dans la tarification, pour faire en outre de la politique tarifaire un avantage compétitif puissant.
  • les risques émergents. Il n’existe rien de pire pour un assureur qu’un risque qu’il ne maîtrise pas ! Les nouveaux risques, tout le monde les distingue… mais personne n’ose vraiment les couvrir, par manque de connaissance. Pricer correctement ces risques sera déterminant dans la question du déblocage des capacités.

Et il y a encore beaucoup à faire sur ces sujets et faire émerger le souscripteur augmenté. Un champ d’opportunités s’ouvre ainsi pour les enablers capables d’élaborer des solutions qui sublimeront le cœur du réacteur des corporates. Avec des propositions de valeur représentatives d’une insurtech 2.0 clairement en train de prendre de l’ampleur.

🧐 La startup à suivre : wefox à la croisée des chemins ?

wefox 2024

Qu’on l’adule ou qu’on la honnisse, wefox ne laisse personne indifférent. L’insurtech la mieux valorisée en Europe, à 4,5 milliards de dollars, demeure un étalon incontournable dans l’analyse de l’écosystème. Alors, quand elle publie des métriques, on s’arrête forcément pour les regarder avec attention.

En 2023, l’Allemande annonce donc avoir brassé 1,5 milliard d’euros de primes à travers ses activités. En parallèle, elle affiche un chiffre d’affaires qui grimpe à 800 millions d’euros, en augmentation de 30% sur l’année. C’est ainsi tout sauf anecdotique, surtout sur des volumes aussi importants.

Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que wefox demeure un acteur hybride. A la fois assureur, courtier et enabler tech. Des casquettes multiples qui ajoutent une certaine opacité sur les activités. Il est en effet toujours compliqué de déceler ce qui marche bien, et moins bien. La nouvelle baseline de l’insurtech et ses récentes avancées sur le terrain de l’embedded nous donnent néanmoins des indices.

Mais la grande information de ce début d’année chez wefox concerne Julian Teicke. L’emblématique fondateur vient, en effet, d’annoncer qu’il abandonnait son poste de CEO. Il n’est pas le seul fondateur de la première vague à avoir fait ce choix, mais c’est un move révélateur.

Pour wefox, les défis d’aujourd’hui ne sont plus ceux d’hier. Elle doit manifestement rationaliser ses activités d’assurance, pour trouver enfin un équilibre et une rentabilité sur son business. Un challenge qui imposait certainement un changement à la barre. Et quelque chose nous dit que les prochains mois pourraient être déterminants pour le futur de la pépite.

🌀 Le « game changer » : 3 gros poissons accélèrent sur le paramétrique. La confirmation d’un changement d’échelle pour ce modèle ?

Assurance paramétrique 2024

En début d’année, au moment de la traditionnelle cérémonie des prédictions, Florian Graillot voyait dans sa boule de cristal une franche accélération sur le paramétrique. Les premiers mois de 2024 viennent confirmer que notre expert a – encore – eu le nez creux.

En effet, ce sont trois grands noms de l’assurance qui viennent consécutivement de faire des annonces en lien avec ce modèle. Munich Re, tout d’abord, a créé une équipe mondiale consacrée au sujet. La solution n’est évidemment pas nouvelle pour le géant de la réassurance. Mais le voir structurer une division ambitieuse est révélateur.

Dans la foulée, deux courtiers de premier plan, Gallagher et Miller, ont également passé la seconde. Et là aussi, en musclant leur stratégie avec le déploiement d’équipes dédiées en interne.

Qu’en déduire ? Le monde de l’assurance ne découvre pas subitement le paramétrique. Rappelons, par exemple, qu’AXA s’est lancé sur le créneau… en 2017 ! Depuis, beaucoup d’initiatives sont venues s’ajouter. On pense notamment à la vague d’insurtechs spécialistes du sujet, qui sont une bonne trentaine rien qu’en Europe. Cependant, exceptée Descartes Underwriting, peu sont encore très connues.

Cela pourrait néanmoins rapidement changer. Le paramétrique atteint en effet un stade de maturité et s’impose comme un outil adapté pour mieux adresser les risques émergents. Et s’il ne sera pas la solution unique, il offre plusieurs avantages.

Tout d’abord, celui de partager le risque entre l’assureur et l’assuré, de manière transparente, et en amont. Aucune mauvaise surprise à l’arrivée ! C’est aussi un moyen pour les assureurs et réassureurs de contrôler précisément leur exposition. Essentiel sur des nouveaux risques qu’ils maîtrisent mal, voire pas du tout.

Enfin, c’est aussi un levier pour améliorer significativement la gestion de sinistre. Dans une interview, Tanguy Touffut de Descartes Underwriting évoquait, aux USA, un process de règlement réduit de 550 jours à… 5 jours ouvrés, pour des clients corporates.

Dans un contexte où le monde de l’assurance s’éveille de plus en plus à la donnée, et dans lequel les frontières s’affinent entre les castes traditionnelles (insurtechs, assureurs, réassureurs), le paramétrique coche toutes les cases pour opérer un passage à l’échelle. Une évolution qui devrait offrir de belles opportunités pour les insurtechs, dont certaines pourraient également en profiter pour changer de dimension.

💰 Les principales levées du mois dernier en Europe

Du côté des levées de fonds en février, Artificial Labs, dont on vous parlait plus haut, arrive en tête. L’insurtech londonienne a étendu sa Série A en y ajoutant 9,3 millions d’euros, après avoir capté 11 millions d’euros en 2022. Un deal qui vient confirmer tout l’intérêt du moment pour les solutions adressant la brique souscription.

Autre startup britannique, Kynd a, de son côté, capté 5,6 millions d’euros à travers un tour de financement mené par Verisk. La startup, qui a récemment fait son entrée au Lloyd’s, se démarque avec ses solutions d’avant-garde qui permettent de mieux appréhender le risque cyber.

Embea a, de son côté, réalisé un très joli seed de 4 millions d’euros. Une somme qui va lui permettre de propulser sa solution de prévoyance en mode embedded, un positionnement audacieux et dans l’air du temps !

Enfin, on revient en Angleterre avec Juniper. La jeune pousse se lance sur le terrain encore largement délaissé de la santé reproductive, et a levé 1,8 million d’euros pour faire décoller ce beau projet.

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