Lemonade, un printemps en mode fourmi ?

Lemonade, un printemps en mode fourmi ?

Alexandre Pengloan
Rédigé par Alexandre Pengloan
27 février 2023 - 3 minutes

La publication des résultats annuels des sociétés cotées en Bourse, voici un moment toujours aussi attendu. C’est notamment le cas pour les insurtechs américaines qui ont été secouées dernièrement, et c’est un doux euphémisme.

La plus emblématique d’entre elles, Lemonade vient de dévoiler ses chiffres – à consulter en intégralité ici. Sans surprise, et malgré quelques signaux encourageants, il est hors de question de céder à l’euphorie. La direction devrait même opter pour une politique d’austérité au cours des prochains mois.

Mais d’abord, focus sur quelques métriques clés :

  • Boostée par l’acquisition de Metromile, Lemonade annonce des revenus totaux de 256,7M$ ;
  • le nombre de clients passe de 1,4 à 1,8 million (+ 27%) ;
  • la prime moyenne par client monte à 346$ (+ 30%), une augmentation largement due au fait que de plus en plus de clients possèdent désormais plusieurs polices, dont l’auto qui fait sensiblement augmenter le panier ;
  • l’entreprise perd toujours de l’argent : 241M$ sur 2022, contre 298M$ l’année précédente ;
  • les dépenses en matière d’acquisition clients restent stables (138M$ contre 141M$ l’an passé) ;
  • enfin, les résultats techniques, métrique de plus en plus incontournable, demeurent moyens. Le ratio sinistres / primes net se dégrade ainsi de 4 points sur l’année (97% contre 93% en 2021).

Lemonade loss ratio 2022

Des ambitions revues – momentanément – à la baisse

Rien de vraiment neuf sous le soleil, donc, pour la petite reine new-yorkaise. La révolution annoncée il y a quelques années n’a pas eu lieu, et le contexte économique du temps fait des dégâts. A l’instar de toutes ses consœurs, et notamment celles positionnées en B2C, elle doit avancer avec prudence. Elle a ainsi opté pour le licenciement d’une partie de ses effectifs, coupant aussi dans les rangs de Metromile, en 2022.

Autre épine dans le pied des dirigeants, la réglementation américaine. Face à l’inflation et l’impact croissant des catastrophes naturelles, l’insurtech souhaiterait augmenter ses primes pour maintenir l’équilibre. Seulement, cette hausse est soumise au bon vouloir des régulateurs… qui semblent prendre leur temps, quand ils ne sont pas réfractaires ! Afin de composer avec ce contexte, Lemonade va donc devoir la jouer fourmi plutôt que cigale au printemps.

On doit obtenir l’autorisation pour ajuster les tarifs de nos polices. Tant que la procédure ne sera pas bouclée, nous allons réduire notre rythme d’acquisition de nouveaux clients. Nous espérons pouvoir envisager une reprise de la croissance à partir du second semestre 2023.

Shai Wininger, cofondateur de Lemonade

Comment le marché financier a-t-il interprété ces résultats et perspectives ? Assez moyennement, puisque l’action Lemonade est de nouveau passée sous la barre des 16$, plus très loin de ses plus-bas historiques.

Pour espérer un spectaculaire rebond, il faudra donc vraisemblablement attendre. Le sort de la partie est cependant loin d’être scellé. L’entreprise possède encore de jolis atouts, et a engagé une réflexion intéressante.

Et si, en s’ouvrant à l’écosystème – partenariats avec des courtiers aux États-Unis, avec Aviva en Angleterre et l’alliance avec BNP Paribas Cardif en France -, Lemonade dessinait les contours d’une stratégie porteuse d’un second souffle ?