Les sirènes de l’Asie – Rencontre exclusive avec Frédéric Panchaud

Alexandre Pengloan
Rédigé par Alexandre Pengloan
24 novembre 2021 - 4 minutes

Il est la voix qui nous aide à comprendre un monde lointain et encore bien mystérieux. Chaque semaine, Frédéric Panchaud, fondateur du désormais incontournable podcast « Asie et Innovations », nous embarque pour un voyage plein de surprises à l’autre bout de la planète. A l’occasion d’un détour sur le plateau de notre Capsule Assurance, il a accepté de nous livrer son regard sur un continent en pleine effervescence. Morceaux choisis d’une longue discussion où il a été question d’assurance, bien sûr, mais aussi de TikTok, de KOL et de métaverse. Attention, ça va décoiffer !

L’Asie, nouveau barycentre du monde

Si près, si loin. Alors que TikTok s’impose comme le réseau numéro chez nos jeunes et que Squid Game fait un véritable carton dans nos salons, l’Asie demeure pour beaucoup un monde bien énigmatique. Poids des représentations, barrière de la langue, différences culturelles… On laisse volontiers une distance entre cet univers et le nôtre. Il n’y a dès lors rien d’étonnant à trouver très peu de sources à propos de l’innovation, et encore moins concernant le domaine de l’assurance, en français.

Heureusement, Frédéric Panchaud est là pour nous sauver. Consultant dans le secteur assurantiel, il a lancé en mai 2020 le projet « Asie et Innovations ». Près de 50 épisodes audio et une grande monographie de Ping An plus tard, il s’est imposé comme la référence absolue sur une niche aussi tentaculaire qu’un continent regroupant 48 pays selon l’ONU et plus de 4,5 milliards d’habitants !

Ma conviction profonde est que le barycentre du monde est en train de basculer vers l’Asie. Je considère que c’est là-bas que ça se passe aujourd’hui en matière d’innovation.

Et pour lui, les prétendues différences culturelles ou la distance physique – qui n’existera plus à l’ère du métaverse –  ne sont que de mauvaises excuses pour ne pas s’intéresser à ce qu’il se passe là-bas (Format audio – 1’13)

Eficiens · Fred Panchaud Son 1
  

Ping An, l’assureur qui ne s’aimait pas

Pour tout assureur sensible à l’innovation, regarder vers l’Est représente donc une nécessité. Et comment ne pas débuter par le phénomène Ping An. Ping An, c’est un mastodonte de l’assurance, avec ses 220 millions de clients et 190 milliards de dollars de chiffres d’affaire. Mais c’est surtout « un assureur qui ne s’aime pas », ainsi que l’image Frédéric.

En effet, le groupe a opéré un pivot depuis environ cinq ans, avec un objectif clair : se muer en acteur technologique à part entière, et devenir un « TikTok like » en quelque sorte. Pour cela, il a structuré sa stratégie autour de deux piliers : développer ses propres assets technologiques et miser sur la création d’écosystèmes. Dans cette logique, l’assurance est donc amenée à devenir une simple brique chez l’un des premiers assureurs mondiaux !

Cette vision s’incarne dans son approche de la santé, dont le projet « Good Doctor » représente un exemple particulièrement édifiant. La base consiste en un service « freemium » qui propose des téléconsultations à quelques 350 millions de personnes. L’objectif de Ping An est ici de capter un portefeuille de clients auxquels il proposera derrière d’autres services : docteur privé, health mall ou produits d’assurance, évidemment. Surtout, l’entreprise va très loin dans la mise en œuvre de la technologie et de l’intelligence artificielle.

Avec Ping An, aura-t-on demain encore besoin de médecins en chair et en os ? Rien n’est moins sûr ! (Format audio – 55′)

Eficiens · Fred Panchaud Son 2
   

Des idées transposables en France ?

« Je ne suis pas sûr que les Américains ou les Européens auraient ce jusqu’au boutisme dans leur manière d’adresser certaines problématiques de santé aujourd’hui », précise toutefois Frédéric Panchaud. Alors, ces modèles et innovations peuvent-ils être répliqués dans le monde occidental ? Pas tous dans l’immédiat, certainement – les débats autour des cabines médicales déployées récemment dans les Monoprix nous ramenant à la réalité –, mais de nombreuses sources d’inspiration sont à considérer.

En Inde, la vision de l’assurance santé façon Digitinsurtech déjà valorisée à plus de 3 milliards $ -, basée sur le digital et la simplicité, est par exemple un must. « Ils font des choses simples et orientée client, mais vraiment ! », appuie Frédéric. De la plateformisation aux écosystèmes, les acteurs asiatiques sont en avance sur de nombreux sujets.

Frédéric nous explique comment ils sont notamment à la pointe dans leur manière d’utiliser les nouveaux outils pour capter le client et animer des « communautés » (Format audio – 1’03′)

Eficiens · Fred Panchaud Son 3
  

Les entreprises asiatiques, qui ont déjà des marchés immenses à adresser localement, ne viendront pas tout de suite, si ce n’est jamais, marcher sur les plates-bandes de nos assureurs. Pour autant, l’assurance change à toute vitesse et ils auraient tort de ne pas avoir le regard tourné vers l’Est. C’est en effet peut-être de ces contrées plus si lointaines que viendront les idées qui, demain, vont transformer leurs métiers, de manière radicale et définitive.