Insurtech Express #6 - 7 questions à Camille Cohignac d'Ipsoon

Insurtech Express #6 - 7 questions à Camille Cohignac d'Ipsoon

Sarada Nourby
Rédigé par Sarada Nourby
23 mars 2023 - 7 minutes

La tech aujourd’hui est sur toutes les lèvres. Tout le monde parle de transformation numérique, de digitalisation et chacun a sa méthode. Alors oui, passer au digital, c’est important, mais pour Camille Cohignac, fondatrice et CEO d’Ipsoon, ce qui prime, c’est d’utiliser toute cette technologie pour en faire quelque chose de concret.

Insurtech Express Camille Cohignac d'Ipsoon

Pour elle, et ses équipes, le travail de l’UX ne consiste pas simplement à faire un joli site, agréable à parcourir. Il s’agit surtout de mettre à disposition de l’utilisateur la bonne quantité d’informations et le laisser choisir en conscience ce qu’il souhaite lire. Et pour cela, l’équipe utilise les outils numériques pour servir le monde réel. À l’occasion de cet Insurtech Express, la designer revient sur la création d’une startup qui veut faire bouger les codes du digital et du design, notamment dans le secteur assurance.

👨‍🏫 Hello Camille ! Ipsoon, c’est quoi ? Attention, il faut être clair comme si tu pitchais devant une classe de CM2 !

Déjà, je vais commencer par la version compliquée. Ipsoon, c’est un studio d’UX design, spécialisé dans l’applicatif.

Et pour traduire de façon très simple : on crée des outils sur internet pour qu’ils soient utiles dans un environnement précis. C’est-à-dire qu’on fait des applications pour que des personnes, qui ont n’importe quoi à faire en ligne, puissent le faire de la façon la plus simple possible. On utilise la technologie en ligne comme un outil qui est utile le monde réel.

🍾 Comment tout a commencé pour Ipsoon ? Sur les bancs de l’école, lors d’une soirée arrosée ?

Ipsoon, c’est d’abord une aventure que j’ai commencée seule, quand j’étais designer en freelance. J’ai débuté dans le secteur de l’assurance suite à une opportunité. Je designais des parcours d’inscription, des services, des espaces personnels, etc. Et à un moment, j’en ai eu marre de travailler sur des interfaces juste parce qu’il fallait en avoir. J’ai développé la forte conviction que l’interface n’était pas une fin en soit.

J’ai donc monté une équipe, et à partir de là, on s’est réellement posé la question de l’intérêt de ces interfaces. On a réalisé que notre but, c’est d’inscrire ces outils digitaux pour qu’ils aient une utilité dans notre monde physique. De faire en sorte qu’ils s’adaptent aux humains qui vont les utiliser.

On est un studio d’UX mais on ne le voit pas comme tout le monde. Pour la plupart, l’UX, c’est permettre de vivre une très bonne expérience dans l’ordinateur. Nous, on conçoit des outils qui vont faire vivre au monde réel, une bonne expérience.

Et pourquoi Ipsoon ? C’est tout simplement un pied de nez à ce « Lorem ipsum », ce faux texte, qu’on trouve dans les maquettes de sites. Nous, on veut faire l’inverse. On ne conçoit pas à partir de faux textes, on propose du sur-mesure avec de la vraie information.

🔢 Si on ne devait retenir qu’un chiffre pour illustrer Ipsoon ? Le nombre de cafés écoulés depuis le début de l’aventure ?

Aujourd’hui, on est très fiers parce qu’il y a 100 000 personnes par an qui rencontrent, à un moment de leur utilisation sur internet, une interface Ipsoon. Pour l’assurance, ça concerne 50 000 utilisateurs, et tout ça avec une équipe de 5 personnes. Et puis, quand on travaille avec un client, en général, il reste avec nous sur du long terme. On suit donc l’évolution de la marque parce qu’on estime qu’il y a toujours quelque chose à faire.

Depuis le début, je me suis prise de passion pour l’assurance. Pour moi, c’est un monde qui, en termes d’expérience, a tellement de choses à faire vivre à ses clients. Pas que sur la souscription ou la gestion des contrats, mais aussi sur l’expérience qu’on offre en tant qu’assureur et la responsabilité qu’on a sur le service. Et c’est illimité. Donc c’est sûr que pour nous, designers, l’assurance est un terrain de jeu infini.

💪 Bosser dans une insurtech, c’est un monde de défis ! Tes plus gros challenges au quotidien ?

Notre plus gros défi, ça a été, et c’est toujours, de convaincre qu’il y a un besoin de récurrence. Les entreprises sont aujourd’hui convaincues sur la nécessité d’optimiser l’UX design. Mais faire accepter la notion d’amélioration en continu d’un produit, c’est beaucoup plus compliqué. J’essaie de convaincre qu’il vaut mieux diluer les coûts et payer tous les mois plutôt que de verser 100 000€ une fois pour ensuite tout revoir parce que le cahier des charges n’était pas bon, par exemple.

L’intérêt de fonctionner de cette façon, c’est qu’on arrive à développer le produit en même temps que l’utilisateur le découvre. Par exemple, pour un parcours d’assurance habitation, c’est voir comment améliorer en continu la compréhension d’une fiche produit, comment on rend compréhensible l’offre, comment on aide les utilisateurs à choisir une assurance plutôt qu’une autre. On doit pouvoir apprendre des usages des utilisateurs. C’est ça, la vie de la marque avec son assuré.

Et c’est ce qui est compliqué avec les gros assureurs, ces « mammouths ». Ils lancent un produit et quand ça ne marche pas, ils doivent tout recommencer. Ils réinventent la roue à chaque fois. Alors que les startups, elles, avancent, suppriment, testent sur du long terme et posent des bases solides à chaque pas. 

Pour moi, dans le monde de l’insurtech, Alan, c’est l’exemple parfait de ce que je décris. Ils lancent une fonctionnalité puis apprennent de ce premier lancement. Ensuite, ils créent une nouvelle fonctionnalité, pour petit à petit devenir ce qu’ils sont aujourd’hui.

🧐 Si on parlait de demain. Dans 3 ans, Ipsoon, ce sera quoi ? Et dans 13 ans ?

Déjà, d’ici 3 ans, Ipsoon c’est la référence du design pour les startups. Et dans 13 ans, la même chose, mais pour les grands groupes !

On ne veut pas être un de ces mastodontes sur le marché. On ne prévoit pas de levée de fonds non plus. Pour nous, notre croissance se doit d’être constante et solide. Surtout, on veut garder une relation forte avec nos clients.

Chez Ipsoon, on a une méthode qui nous est vraiment propre. C’est cette volonté de faire de la tech un outil ancré dans le réel tout en avançant en continu. Et en interne, le but, c’est de voir les collaborateurs évoluer en même temps que les projets. On fait tous le même métier, on est designers mais chacun a sa spécialité. Par exemple, moi, c’est l’usage des mots alors qu’une collègue sera plus experte en direction artistique. On a une équipe réellement multidisciplinaire. 

Le but, c’est d’être solide ! Que nos clients soient confiants sur nos compétences. C’est ce qu’il fait qu’ils restent ensuite. 

🌀 Ça bouge beaucoup dans l’assurance. Une info qui t’a interpellée dernièrement ?

J’ai remarqué que de plus en plus, le secteur de l’assurance s’intéresse au marché du bien-être. J’ai vu des assureurs s’intéresser à des sujets comme la sophrologie, la naturopathie, la médecine douce, etc. alors qu’on les attendait plus sur la prévention du sinistre.

Ce sujet du bien-être semble assez éloigné du sinistre, mais la santé mentale a pris une réelle importance dans le monde d’aujourd’hui. Et ça, les assureurs et même les GAFAM l’ont bien compris. La santé mentale a un réel impact, et il est possible d’utiliser la tech pour adresser ce sujet. Encore une fois, ce n’est qu’un outil. 

😋 Question bonus (et ça restera entre nous ! ). Raconte-nous une anecdote dont tu n’as jamais osé parler sur les réseaux.

Je n’ai pas de formation de designer. J’ai étudié le droit et quand j’ai commencé à travailler, j’ai fait du journalisme. Je rédigeais des chroniques pénales et je restituais des procès. Et aujourd’hui, il n’y a pas un jour où je n’utilise pas mes anciennes compétences.

Parce que, que fait un bon designer ? Il doit être à l’écoute de ses clients. Il doit savoir observer et analyser également, pour pouvoir restituer une réalité à un moment. Ce sont exactement les compétences d’un bon journaliste. Donc au final, la passerelle entre le journalisme et le deisgn était plutôt évidente pour moi.