Insurtech Express #1 - 7 questions à Cyril Noyer de Socotra

Insurtech Express #1 - 7 questions à Cyril Noyer de Socotra

Alexandre Pengloan
Rédigé par Alexandre Pengloan
31 janvier 2023 - 7 minutes

Voici un nom dont vous allez entendre parler dans le paysage de l’assurance française en 2023. Socotra, insurtech fondée à San Francisco, arrive dans l’Hexagone pour inonder le marché avec ses solutions d’avant-garde. L’entreprise californienne fournit une plateforme centrale basée sur le cloud qui permet aux assureurs de créer leurs produits et d’administrer leurs polices en tirant plein profit du digital et de la tech.

A la manière des vendeurs de pelles et de pioches au temps de la conquête de l’Ouest, Socotra, c’est l’acteur qui fournit l’outillage aux acteurs qui veulent révolutionner l’assurance. Cyril Noyer, responsable des destinées françaises et européennes de l’Américaine, qui figure dans le Top 100 annuel de Sonr, a accepté d’être le premier invité de notre rubrique « Insurtech Express ». Ancien de FRISS, ce fin connaisseur de l’insurtech nous présente ses nouvelles ambitions en plus de nous dévoiler quelques secrets.

👨‍🏫 Hello Cyril ! Que fais-tu chez Socotra ? Attention, il faut être clair comme si tu pitchais devant une classe de CM2 !

L’ambition, c’est d’apporter la modernité au monde de l’assurance. Comment ? En faisant en sorte que les assureurs puissent utiliser l’outil qui leur permet d’administrer leurs produits et polices comme on utilise aujourd’hui un smartphone ou Google. Que tout soit le plus intuitif et naturel possible.

Quand tu te lèves le matin, il y a parfois sur ton téléphone un message qui parle des mises à jour. Y penses-tu vraiment ? Non, tu appuies simplement sur un bouton, ça se fait tout seul et tu profites des nouvelles fonctionnalités sans te poser la moindre question. Socotra, c’est la même chose : un outil qui change le quotidien des assureurs grâce aux super-pouvoirs de la technologie.

Concrètement, tout va se faire de manière simple et automatisée pour le développement d’un nouveau produit ou son déploiement dans un nouveau pays. C’est un gain de temps énorme pour les assureurs, mais aussi les insurtechs. Les startups, notamment, sont friandes de ces solutions qui leur permettent d’aller vite et de saisir les opportunités quand elles arrivent.

🍾 Comment tout a commencé pour Socotra ? Sur les bancs de l’école, lors d’une soirée arrosée ?

Dan Woods, le fondateur de Socotra, a effectué le début de sa carrière dans les plateformes de données. A cette occasion, il a rencontré pas mal d’assureurs. Et c’est à ce moment qu’il a constaté qu’il y avait une grosse opportunité pour eux de moderniser toute cette technologie sur laquelle reposaient les données des assurés. Il a donc décidé d’appliquer ce qu’il maîtrisait au monde de l’assurance. Il s’est alors entouré de spécialistes du secteur et c’est comme ça qu’ils ont fondé Socotra en 2014.

Quant au nom Socotra, il s’agit d’un groupe d’îles dans l’océan Indien. Le crédo de l’entreprise, c’est de croire profondément en l’écosystème de l’assurance, et au fait qu’il est possible de connecter tous les membres pour aller plus loin. La plateforme a été créée avec cette philosophie de pouvoir se connecter à tout type de technologie, que ce soit la tarification, les systèmes de paiement, les fournisseurs de données. Comme des îles qui communiquent entre elles pour former un archipel.

🔢 Si on ne devait retenir qu’un chiffre pour illustrer Socotra ? Le nombre de cafés écoulés depuis le début de l’aventure ?

C’est 2 ! Parce que je pense à deux mois. Une de nos insurtechs clientes, Elpha Secure, aux États-Unis, a réussi à mettre en place un produit de cyber assurance en l’espace de deux mois.

Cela démontre qu’il est possible de mettre très vite sur le marché des offres novatrices grâce à nos solutions et l’agilité de notre plateforme !

💪 Bosser dans une insurtech, c’est un monde de défis ! Ton plus gros challenge rencontré en 2022 ?

Ce qui m’affecte le plus, ce sont les investisseurs qui se montrent plus frileux face à l’insurtech. Cela fragilise nos partenaires et nos clients. Heureusement, de ce point de vue, Socotra avait levé en début d’année une Série C de 50 millions $, ce qui nous a mis à l’abri en nous donnant une marge de manœuvre assez conséquente pour la suite. Mais ça affecte clairement l’écosystème.

Je rencontre pas mal d’insurtechs en France actuellement et plusieurs sont confrontées à des problématiques de financement. C’est aussi vrai en Espagne. Les exemples se multiplient. On découvre même que certaines, que l’on pensait grosses et solides, rencontrent des difficultés. Elles décalent les opérations et partenariats car elles revoient leurs priorités actuellement. Ça bloque la mise en œuvre de projets d’innovation dont elles ont pourtant besoin.

🧐 Si on parlait de demain. Dans 3 ans, Socotra, ce sera quoi ? Et dans 13 ans ?

Socotra ambitionne de façon certaine de devenir la plateforme centrale de référence, que ce soit pour les grandes compagnies d’assurance ou les insurtechs. Ces trois dernières années, on a doublé chaque année notre chiffre d’affaires et on prévoit de poursuivre cette croissance exponentielle.

On a aujourd’hui 30 insurtechs clientes, l’idée dans trois ans, c’est d’en avoir 200, et de développer aussi nos partenariats avec les assureurs historiques afin de les accompagner dans leur transformation.

A plus long terme… Avant de rejoindre Socotra, j’ai pensé à toutes ces sociétés qu’on a vu naître et grandir, comme Google ou Salesforce, typiquement, qui ont commencé petit. Ces entreprises ont en commun d’avoir commencé leur développement avec des startups, avant de devenir progressivement incontournables pour toutes les grosses structures. Aujourd’hui, pas une société ne peut s’en passer. Dans le monde de l’assurance, finalement, c’est un peu comme ça que je vois le développement à plus long terme de Socotra. On a démarré avec des insurtechs, et on veut devenir la norme pour tous les gros assureurs.

🌀 Ça bouge beaucoup dans l’assurance. Une info qui t’a interpellé dernièrement ?

Je retiens deux informations. Premièrement, l’agrément obtenu par Descartes Underwriting en fin d’année, dans la lignée de sa levée de fonds à neuf chiffres. Deuxièmement, ce sont toutes les opérations de financement autour de l’embedded, notamment en France avec Neat, Evy ou Owen.

Assurance paramétrique et embedded : en 2023. ça va être pour moi l’explosion de ces deux modèles !

Ce qui m’interpelle ici, c’est qu’on voit des concepts nouveaux et très innovants comme l’assurance paramétrique ou l’assurance embarquée, qui sont en train de passer de sujets buzz à une véritable réalité. C’est là aussi où je décèle des opportunités pour Socotra. Parce qu’avec notre plateforme, c’est facile de créer ce type de produits et profiter aussi de ces approches innovantes amenées à se développer.

😋 Question bonus (et ça restera entre nous ! ). Raconte-nous une anecdote dont tu n’as jamais osé parler sur les réseaux.

AXA a récemment utilisé notre plateforme pour concocter un produit innovant et intégré à l’application Uber. Il s’agit d’une solution d’assurance embarquée et basée sur l’usage. C’est une référence qui fait mouche à chacun de mes rendez-vous. Et pourtant, j’ai mis du temps à me plonger dans ce cas d’usage… parce que je ne voyais pas vraiment son potentiel !

Je ne pensais pas que des startups type Stello ou Joltee me demanderaient de développer cet exemple, et pourtant… En fait, même les insurtechs sont très intéressées de comprendre pourquoi et comment AXA s’aventure sur ce créneau. Et ça m’a pénalisé sur pas mal de rendez-vous au départ mais j’ai depuis bien rectifié le tir ! Cette anecdote nous montre aussi que l’innovation n’est pas l’apanage des insurtechs et qu’il se passe beaucoup de choses intéressantes dans les divisions innovation des grandes compagnies.